Wednesday 21 November 2018

Cameroonians Increasingly wanting to be heard in matters of collective interest.




Problems of insecurity, under development and marginalisation represent a veritable Time Bomb in Cameroon. –Circle of thinkers and Elites of Adamawa

Memorandum from Adamawa Region addressed to the ruling class in Cameroon as published in Journal l'œil du Sahel of November 14, 2018

MEMORANDUM DE L'ADAMAOUA publié ce jour par le journal l'œil du Sahel du 14/11/2018. 

Monsieur Paul BIYA Président de
la République du Cameroun
S/C
Monsieur le gouverneur de la
Région de l’Adamaoua

Excellence,
L’élection présidentielle du 07 octobre 2018 vient de connaître son terme avec la publication du résultat official par le Conseil Constitutionnel. Vous avez été réélu avec un taux de 71,28%. La région de l’Adamaoua vous a choisi à 79,77%, soit plus de huit (08 ) points au-dessus de votre score national.
A l’aube de ce nouveau septennat, le temps des promesses électorales est révolu. Place maintenant aux actions concrètes qui détermineront à court terme la situation politique de la
région avec les élections législatives, municipales et régionales. Le Cercle de Réflexion des Elites de l’Adamaoua (CREA) a l’immense responsabilité de porter à votre haute attention les problèmes spécifiques de cette région que taisent à dessein ou par crainte révérencielle les élites politiques. Celles-ci sont vieillissantes et impopulaires, plus soucieuses de leur confort personnel et de la conservation de leurs privilèges que du bien-être des populations.

Au rang des problèmes majeurs auxquels est confrontée notre région, figure l’insécurité.
En effet, depuis l’année 2013, la région de l’Adamaoua est en proie au phénomène de prise d’otages et de vol de bétail, en raison de sa position géographique unique, frontalière avec
trois pays en crise (République Centrafricaine, Nigéria et Tchad). Des bandits armés, sillonnant en toute liberté les zones rurales, commettent des exactions d’une brutalité inouïe.
Des éleveurs et des agriculteurs ou leurs proches sont kidnappés et leur libération est subordonnée au paiement des rançons. Les cas suivants illustrent cette nouvelle forme de banditisme rural :
• le 14 mars 2017, LAWAN BAKARY, ALHADJI OUMAROU et ALHADJI BAKARI sont enlevés dans le village dit SALTAKA dans l’arrondissement de NGANHA ; trente millions (30.000.000) FCFA ont été versés aux ravisseurs pour obtenir leur libération.
• dans la même localité, le nommé ALHADJI AMADOU a été kidnappé et libéré sept (07) mois plus tard après paiement de la somme de vingt millions (20.000.000 FCFA) ;
• dans l’arrondissement de MARTAP, un éleveur nommé ALHADJI DAOUDA a été enlevé courant janvier 2016 puis libéré après versement d’une rançon de vingt-quatre millions
(24.000.000) FCFA ;
• dans le même arrondissement, au lieu-dit BOL ISSA, les nommés MOHAMADOU ARABO, MAÏGARI BELLO, ALHADJI MOUSSA et MOHAMADOU FAÏÇAL ont payé vingt-quatre millions (24.000.000) FCFA pour recouvrer leur liberté auprès des preneurs d’otage.
• dans l’arrondissement de Belel, en mai 2015, un enfant de dix (10) ans a été kidnappé. Quelques jours plus tard, son corps sans vie a été retrouvé en brousse. La victime a été sauvagement assassinée malgré le paiement de rançon par ses parents.

Les cas ci-dessus sont loin d’être exhaustifs ; beaucoup d’otages malheureusement sont parfois froidement abattus, pendus ou égorgés en cas de non-paiement de rançon. Face à cette situation, beaucoup d’éleveurs ou agriculteurs bradent tout leur patrimoine pour payer des rançons.
On estime aujourd’hui à plus d’un milliard le montant des rançons versées ces trois dernières années, chiffre probablement sous-estimé, compte tenu de nombreux cas de non-dénonciations par peur des représailles. Aujourd’hui plusieurs villages sont désertés par leurs habitants à cause de cette insécurité.
Le nombre de réfugiés internes consécutifs au phénomène de prise d’otages est estimé à plus de quatre mille (4 000). Les vols de bétails perpétrés par les bandits organisés ont pris également une croissance exponentielle. Pas un jour sans qu’on ne déplore le vol de bétail. A titre illustratif, un réseau qui avait à son actif plus de trois mille têtes de bêtes volées a été démantelé à Meïganga. Les phénomènes de prise d’otage et de vols de bétail affectent durablementl’économie de la région basée essentiellement sur l’élevage de bovins et sur
l’agriculture, accentuant ainsi la pauvreté et le chômage. Les populations de l’Adamaoua sont meurtries et frustrées par l’inaction des autorités qui pourtant ont vocation à protéger les personnes et leurs biens.

La Justice, chargée de réprimer les vols de bétail, semble complaisante, voire complice des auteurs qui sont notoirement connus et bénéficient de la protection de ceux qui sont chargés deréprimer ces actes. Les voleurs de bétail sont très souvent remis en liberté à l’instar des membres du réseau démantelé à Meïganga dans le Mbéré. La corruption de la justice procure l’impunité aux bandits qui continuent leurs activités criminelles en toute sérénité ; Les forces de sécurité et de défense sont quasi absentes sur le terrain. En dehors de leurs effectifs insuffisants, les éléments de l’armée ne disposent pas de matériels roulants facilitant leurs déplacements dans cette vaste région. Comment peut-on imaginer que dans les localités de Martap, Nganha, Belel, Mbé, Dir, Ngaoui, Minim, Doualayel, Garbaya etc… épicentres de la grande criminalité rurale, les maigres effectifs en détachement ne disposent pas de véhicules d’intervention alors que dans les grands centres urbains, des hauts gradés de l’armée et de la police se baladent dans des 4x4 rutilants hors de prix, sans que ces véhicules ne servent à la sécurité de leurs concitoyens.

Monsieur le Président de la République, l’insécurité dans l’Adamaoua, perpétrée par les preneurs d’otage est susceptible de déstabiliser tout le pays. Les bandes armées qui sillonnent les zones rurales sont aussi pernicieuses que les éléments de Boko Haram. Elles font des prises d’otage, des vols de bétails et des assassinats leur marque de fabrique. Lors de votre discours à l’Assemblée Nationale prononcé le 06 Novembre 2018 après votre prestation de serment, le problème d’insécurité dans l’Adamaoua n’a pas été évoqué. Pourtant sa gravité est réelle. Tout laisse croire que les autorités locales n’ont pas cru devoir porter cette situation à votre haute connaissance.
Si aucune mesure concrète n’est prise, il y a risque de voir des jeunes chômeurs de plus en plus nombreux s’enrôler dans ces bandes armées, phénomène susceptible de faire le lit du terrorisme. Outre ce problème d’insécurité, la région de l’Adamaoua souffre de l’insuffisance d’infrastructures de base propices au bien-être des populations. L’érection du Département de l’Adamaoua en province ne s’est pas accompagnée d’infrastructures adé- quates de transport, de santé et, d’éducation. Les réseaux de distribution d’eau et d’électricité sont quasi inexistants.
L’Adamaoua est aujourd’hui parmi les dix régions du Cameroun, la dernière en matière de développement malgré ses énormes potentialités économiques.
Peuplée de plus d’un million d’habitants (recensement de 2005), la régioncompte de nos jours plus d’un million huit cent mille (1.800.000) habitants
selon les estimations les plus prudentes.
Cette population se caractérise par : - 53% âgés de moins de 20 ans ; - 55% vivant en dessous du seuil de pauvreté ; - 77% n’ayant pas accès à l’eau potable ; - 75% n’ayant pas accès à l’électricité.

Le secteur de la santé publique est marqué par l’insuffisance d’infrastructures d’accueil et la rupture d’approvisionnement en médicaments essentiels dans les centres de santé. La région
compte seulement 40 médecins sur environ 1600 exerçant au Cameroun soit un médecin pour 50 000 habitants contre un médecin sur 3 000 habitants recommandé par l’OMS. A cette insuffisance quantitative, s’ajoute l’absence de médecins spécia- listes (Cardiologue, Rhumatologue, Gynécologue, Pédiatre, Urologue...) de sorte que seuls les malades nantis peu- vent s’offrir « l’évacuation sanitaire » dans les grands centres urbains (Yaoundé ou Douala).
S’agissant des infrastructures routières, sur environ 5000 km de route, seuls 350 km sont bitumés et ce grace à la nationale n°1 qui traverse la region pour desservir le Tchad en passant par Garoua ou par Touboro. L’axe Garoua-Ngaoundéré, long de 275 km, route mythique du Grand Nord inaugurée en 1974, est aujourd’hui dégradée au point où il faut plus de 8 heures pour parcourir cette distance. Cette malheureuse situation laisse toutes les élites de la Région Septentrionale indifférentes. En dehors de l’axe Ngaoundéré Meïganga, aucune route bitumée ne relie la Capitale Régionale aux autres chefs-lieux de départements (Banyo, Tignère, Tibati).

En ce qui concerne l’éducation, l’Adamaoua est classée parmi les régions les moins scolarisées du pays. Ce secteur est caractérisé par l’insuffisance des établissements scolaires.
 Dans les zones rurales, de nombreuses écoles primaires sont logées dans des cabanes ou des huttes. La plupart des écoles (80%) ne disposent ni de points d’eau, ni de latrines ; ce qui expose les élèves aux maladies. Malgré l’existence d’un Centre Universitaire à Ngaoundéré depuis plus de 25 ans, l’accès, surtout au cycle supérieur est fermé aux enfants de l’Adamaoua du fait d’une selection arbitraire et tribale. Les concours d’entrées dans les grandes écoles sont devenus un haut lieu des magouilles, des dessous de table et des trafics d’influences aux profits des plus nantis ou des élites politico administratives .les enfants des familles pauvres sont exclus de fait de la gestion des affaires du pays.
L’Adamaoua est pratiquement la seule région qui ne dispose ni d’industrie ni d’entreprise publique pourvoyeuse d’emplois. Les sociétés de développement génératrices d’emplois et de revenu sont inexistantes, la SODEBLE et de la Société de Tannerie et de Peausserie du Cameroun étant fermées depuis belle lurette. Ce sous-développement est certainement la conséquence de l’absence des ressortissants de la région dans la gestion des affaires du pays.
Dans le précédent memorandum publié le 15 aout 2016, votre haute attention a été attirée par la marginalisation des ressortissants de l’Adamaoua. Chiffres à l’appui, et ce dans tous les grands corps de l’Etat, l’Adamaoua brille par sa sous-représentation : − 03 membres du Gouvernement sur un effectif de 60 ; − Aucun ressortissant responsible à la Présidence de la République ; − 02 Secrétaires Généraux de Ministère sur 37 ; − 01 Directeur Général sur 97 entreprises et établissements publics; − 01 Général des armées sur 37 ; − 04 Commissaires divisionnaires sur 100 ; − 0,5% de ressortissants admis aux grandes écoles (Enam, FMSBM, Emia, Polytechnique etc) ; − 0,3% dans la fonction publique et les entreprises publiques ; − 02 Directeurs de l’Administration Centrale sur 700 ; − Aucun Inspecteur Général. De tout ce qui précède, il est indéniable que la région de l’Adamaoua est victime d’ostracisme assimilable à une discrimination punitive ou à un mépris. Les élites politiques de l’Adamaoua dont le rôle est de défendre le développement de la région et le bienêtre des populations ont failli. Il est loisible de constater que cette élite vieillissante, égoïste et couarde est incapable de résoudre le moindre problème de la région constituée à 70% de jeunes de moins de 35 ans.

Faute de trouver des solutions durables et justes aux problèmes de sécurité, de sous développement et de marginalisation de ses ressortissants, ces jeunes représentent une veritable bombe à retardement. Le taux officiel d’abstention de 47% constatés lors de la dernière election présidentielle et le suffrage accordé au jeune candidat Cabral LIBII ne sont pas anecdotiques, mais plutôt témoignent de la lassitude et de la defiance vis-à-vis de cette élite qui ne se manifeste que lors des échéances électorales.
Veuillez agréer Excellence
Monsieur le Président, l’expression de
notre très haute considération.
Ngaoundéré, le 07 Novembre 2018
Pour le Cercle de Réflexion des
Elites de l’Adamaoua
Le Coordonnateur
ABBO HAMADJOULDE
CC : Premier Ministre


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